Démocratie au travail : est-ce possible et comment l’instaurer au mieux ?
La démocratie est souvent affaire de politique et évoque alors les élections. On assiste toutefois à la naissance d’un mouvement pour rendre les milieux de travail plus démocratiques. Dans ce cas-ci, il s’agit moins de permettre aux travailleurs de voter sur chaque décision que de les libérer des contraintes : peur d’être congédié pour avoir critiqué des idées et des comportements malsains, peur de faire des suggestions ou de travailler de façon plus autonome.
Le but de la démocratie au travail est de créer un milieu plus invitant et plus productif, ce qui demande un engagement de tous les paliers hiérarchiques. Mais cela convient-il à votre petite entreprise ?
Définir la démocratie au travail
L’éthymologie du mot démocratie nous ramène aux mots grecs demos et kratein, qui signifient littéralement le « pouvoir au peuple ».
La démocratie au travail est l’application de l’équité sous diverses formes (notamment le vote, les débats, le cours normal de la loi et les systèmes d’appel). Elle confère aux employés une plus grande voix au chapitre quant à la façon de faire les choses et le travail qu’ils font. L’auto-gouvernance est un objectif de base.
Dix principes fondamentaux
Tous les systèmes de gouvernance s’appuient sur une série de principes sous-jacents. Voici donc les 10 principes directeurs de la démocratie au travail, selon l’organisme international Worldblu, adepte de la « liberté au travail ».
- But et vision : une entreprise démocratique définit clairement la raison de son existence (son but), la direction qu’elle prend et ce qu’elle espère réaliser (sa vision).
- Transparence : franchise envers les employés pour ce qui est de la santé financière, de la stratégie et des priorités de l’entreprise.
- Dialogue et écoute : plutôt que d’imposer un monologue des dirigeants ou le silence dysfonctionnel qui caractérise la plupart des milieux de travail, les entreprises démocratiques s’engagent à avoir des conversations qui apportent un nouveau sens et favorisent de nouveaux rapports.
- Équité et dignité : l’égalité est la règle, c’est-à-dire accorder les mêmes privilèges et le même traitement à tous.
- Imputabilité : on pointe du doigt, non pas pour blâmer, mais pour libérer. Il s’agit d’établir très clairement qui est imputable envers qui et de quoi.
- Individualisme et collectivisme : l’individu est tout aussi important que le groupe, ce qui veut dire que la contribution individuelle des employés est reconnue ainsi que leurs réalisations pour l’atteinte des objectifs collectifs de l’entreprise.
- Choix : offrir aux employés des choix significatifs en matière d’attribution des tâches, des heures et du lieu de travail.
- Intégrité : comprendre que la liberté exige de la discipline et faire ce qui est juste sur un plan moral et éthique.
- Décentralisation : s’assurer que le pouvoir est partagé et distribué convenablement entre les membres de l’entreprise.
- Réflexion et évaluation : favoriser la rétroaction et le perfectionnement continus, la volonté d’apprendre des leçons du passé pour améliorer l’avenir.
Mettre en pratique la démocratie au travail
La notion de liberté au travail peut sembler peu pratique. Après tout, sans autorité ni structure, une entreprise sombrerait dans l’anarchie.
La démocratie au travail n’exige pas de restructuration radicale, mais introduit plutôt des mécanismes de responsabilisation des employés. Voici quelques exemples :
Offrir des vacances payées illimitées. Cela permet aux employés de prendre tout le temps de congé dont ils ont besoin sans avoir à s’inquiéter de leur fidélité.
Transparence dans l’échange de données sur l’entreprise (chiffres, régimes, gains et pertes). En informant vos employés sur les résultats et les projets de l’entreprise, vous les mobilisez davantage.
Un programme confidentiel permettant de signaler des manquements, sans représailles à l’encontre de ceux qui font le signalement.
Des réunions-débats prévoyant des séances de questions et réponses franches et honnêtes. Les impressions et les critiques des employés sont sollicitées, traitées avec respect et donnent lieu à un suivi.
Un boîte à idées sur l’Intranet : page Web sur l’Intranet de l’entreprise où les employés peuvent soumettre des idées sur lesquelles les collègues voteront. Des prix sont distribués à chaque trimestre pour les meilleures trouvailles.
Offrir un système d’appel lorsque des employés sont rétrogradés, congédiés ou punis de façon arbitraire.
Les inconvénients d’une démocratie trop libérale au bureau
Comme dans tout système organisationnel, la démocratie au travail a ses revers. D’une part, sa mise en œuvre demande un surplus de travail. Pour être équitable et obtenir l’opinion des employés, les gestionnaires doivent faire plus que d’aboyer des ordres aux gentils exécutants.
Il y a aussi la question des attentes toujours plus élevées. Les travailleurs sont déçus lorsque leurs suggestions ne sont pas adoptées. À la longue, vous pourriez finir par vous mettre à dos vos employés les plus dévoués.
Un troisième inconvénient est le risque que court le travailleur qui commente honnêtement une situation. Même s’il a l’assurance qu’aucune représaille ne sera prise à son endroit, ils risque de toucher une corde sensible chez les gestionnaires insécures, qui pourraient alors prendre des mesures discriminatoires contre lui, de façon subtile et continue.
Les entreprises canadiennes sont dans le coup
En 2015, deux employeurs canadiens se sont retrouvés sur la liste WorldBlu des milieux de travail les plus axés sur la liberté : NRI Distribution, une entreprise d’entreposage et d’exécution de Kamloops (C.-B.) et LEARN, un organisme sans but lucratif spécialisé dans les technologies éducatives et le matériel d’apprentissage, situé à Laval (Québec).
Ces deux organisations ont mit en œuvre des mécanismes de démocratie au travail, qui ont entraîné une hausse du maintien des effectifs et de l’autonomie. C’est peut-être bien l’un des avantages abordables que peut offrir votre petite entreprises pour se démarquer à titre d’employeur de choix.